Nourrir le monde à l’ère de l’Anthropocène
Une alimentation capable de nourrir 10 milliards de personnes d’ici 2050.
La planète bleue, Photo EUMETSAT / ESA © ESA
Concevoir une alimentation mondiale qui puisse concilier santé planétaire et préservation de la biodiversité à l’horizon 2050, telle a été la mission du consortium de scientifiques composant la « Commission EAT-Lancet » en 2019. Cette dernière a radicalement mis en perspective les enjeux du système alimentaire et a appelé de ses vœux une « Grande Transformation alimentaire ». Elle a indiqué les changements profonds requis dans la production et la consommation des aliments pour répondre aux défis de la malnutrition, du changement climatique et de la perte de biodiversité.
Les principaux objectifs en matière de santé sont l’adoption d’un régime alimentaire basé principalement sur les végétaux, la réduction significative de la consommation de viande rouge, de sucres raffinés et d’huile de palme. Ce régime, appelé « régime de santé planétaire », repose sur des recommandations nutritionnelles conçues pour prévenir les nombreuses maladies liées à l’alimentation, lutter contre la suralimentation qui affecte aujourd’hui 25 % de la population mondiale et garantir à plus de 800 millions de personnes actuellement sous-alimentées un accès à une nourriture suffisante.
Sur le plan environnemental, cela implique de transformer les pratiques agricoles afin de réduire de moitié les émissions de gaz à effet de serre qui en sont issues, de préserver les ressources en eau et en terres arables, d’adopter des méthodes régénératives pour l’eau et les sols et de limiter les pertes et gaspillages alimentaires afin de préserver les écosystèmes naturels. Le rapport de la « Commission EAT-Lancet » souligne la nécessité d’anticiper une production alimentaire capable de nourrir 10 milliards de personnes d’ici 2050, soit 25 % d’humains de plus qu’aujourd’hui, tout en respectant les « limites planétaires », notamment en préservant les deux tiers des terres agricoles pour les cultures végétales alimentaires plutôt que pour l'élevage intensif ou pour des cultures non nourricières.
Andries Beeckman, Un étal de marché à Batavia, 1640 – 1666, Rijksmuseum, Amsterdam, SK-A-4070 © Rijkstudio
L’eau, un nutriment vital
L’eau est la denrée alimentaire dont aucun individu ne peut se passer plus de quelques jours sans mettre sa vie en danger. Dans le corps, l’eau joue un rôle clé notamment dans la digestion, le transport et l’absorption des nutriments ainsi que la régulation de la température. L’ensemble des organes et tissus du corps doivent être hydratés en permanence pour compenser les pertes régulières en eau dans les urines, les selles, la transpiration et la respiration. Un adulte doit consommer en moyenne deux à trois litres d’eau par jour, par la boisson mais aussi par les aliments.
Les puits les plus anciens creusés par l’homme ont été découverts en Chine et en Mésopotamie. Ils datent du néolithique, de 8 000 à 10 000 ans avant le temps présent. Viendront ensuite les techniques de canalisation et d’irrigation, les barrages et réservoirs, et puis, dans l’antiquité romaine, la construction d’aqueducs et de systèmes de distribution d’eau potable.
L’accès à l’eau potable est inégal dans le monde et représente souvent le premier enjeu de sécurité alimentaire. Selon la synthèse des connaissances scientifiques publiée dans la revue Science en 2024, 4,4 milliards de personnes n’ont pas un accès régulier et garanti à une eau potable saine. Il peut s’agir d’une question de qualité : soit les eaux sont contaminées par des microbes, ce qui entraîne des maladies comme le choléra et la diarrhée, responsables dans les pays en développement d’un demi-million de décès annuels selon l’Organisation mondiale de la Santé, soit les eaux sont polluées par les activités agricoles et industrielles, le rejet des eaux domestiques ou encore le plomb des anciens réseaux de distribution, ce qui est davantage les cas dans les pays industrialisés. Il peut aussi s’agir d’une question de disponibilité : en Afrique subsaharienne, plus de 60 % des populations rurales n’ont pas un accès garanti à l’eau, en Inde et en Chine, des mégapoles comme Chennai, New Delhi, Beijing ou Shijiazhuang souffrent chaque année de pénuries.
Photo Josfor © Getty Images Pro
Le sel, un nutriment essentiel
Les humains produisent du sel pour leur alimentation depuis environ 8 000 ans et les Égyptiens l’utilisaient pour conserver des aliments il y a 5 000 ans déjà. Selon les régions on exploitait le sel des lacs et marais salants, de mines et de sources salées. On a également produit du sel à partir de la cendre de certaines plantes. Devenu un condiment essentiel dans toutes les cultures culinaires, le sel a marqué l’histoire. Il a soutenu le développement de routes commerciales et l’émergence de villes comme Salzbourg, la « ville du sel ». Dans l’Empire romain, le sel était une ressource si précieuse qu’il servait parfois à la paye des soldats, ce qui est à l’origine du mot « salaire ». Sa production et son usage ont marqué des sociétés sur tous les continents, jouant un rôle clé dans l'histoire économique et culturelle mondiale.
Le sel est vital pour le bon fonctionnement du corps humain, en particulier pour la régulation des fluides et la transmission nerveuse. Cependant, une consommation excessive de sel peut entraîner des problèmes de santé, notamment l’hypertension artérielle et un risque accru de maladies cardiovasculaires. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) recommande une consommation maximale de 5 grammes de sel par jour. La consommation mondiale moyenne est de plus de 10 grammes par jour et par personne. En Suisse, elle est de 9 grammes par jour, soit 75 % au-dessus de la recommandation ! Les principales sources alimentaires de sel incluent : le pain et les produits de boulangerie (27 % de l’apport) ; les plats et aliments à base de féculents (20 %) ; les viandes et charcuteries (13 %) ; les sauces (9 %) ; les fromages (8 %). Le sel utilisé dans l’alimentation, quelle que soit son origine, est un cristal de chlorure de sodium (NaCl). Selon les sources naturelles desquelles il provient, le sel peut contenir des oligoéléments essentiels ou utiles à la santé, comme l’iode (Io) dans le sel marin, le fer (Fe) ou le magnésium (Mg).
Quang Nguyen Vinh © Pexels
Protéines animales
Durant plus de deux millions d’années, le genre humain s’est repu de protéines animales grâce à la chasse. La domestication des animaux d’élevage a quant à elle commencé il y a environ 10 000 ans au cours de la « révolution néolithique ». L’élevage de bétail pour la production de viande a connu un essor considérable entre le XIXe et le XXe siècle, sous l’effet de la révolution industrielle, de l’urbanisation, de l’augmentation du pouvoir d’achat et d’un accroissement considérable de la population. Pourtant, parmi la diversité des oiseaux et des mammifères disponibles sur la planète, seule une trentaine d’espèces est couramment consommée, notamment les poulets, les porcs, les vaches et les moutons. Si la pêche semble s’être répandue plus tardivement, il y a moins de 50 000 ans, le poisson occupe aujourd’hui une place importante dans le régime alimentaire global, constituant une source essentielle de protéines pour plus de trois milliards de personnes.
Une consommation trop importante de viande a un impact négatif sur la santé humaine, augmentant le risque de maladies cardiovasculaires, de diabète et de certains cancers. La production de viande contribue pour sa part à la déforestation, à la perte de biodiversité et aux émissions de gaz à effet de serre. La pêche industrielle de son côté, en plus de surexploiter les stocks de poissons, détruit les habitats marins et perturbe les écosystèmes océaniques. Ensemble, ces pratiques exercent une pression intenable sur les milieux naturels et compromettent la durabilité environnementale de la planète.
Frans Snijders, Nature morte au garde-manger, ca 1616 – ca 1625, Rijksmuseum, Amsterdam, SK-A-379 © Rijkstudio
Des protéines végétales ?
Les protéines sont constitutives de tous les êtres vivants. On en trouve donc dans tous les aliments, y compris végétaux, mais en quantité plus élevée dans les fruits à coque et les légumineuses. Les pois secs et les lentilles sont issus du Croissant fertile au Moyen-Orient, où ils sont consommés depuis environ 10 000 ans, tandis que le soja est cultivé en Chine depuis plus de 4 000 ans. Les haricots et les cacahuètes proviennent d’Amérique du Sud, alors que diverses sortes de fruits à coque, tels que les amandes, les noisettes, les pistaches et les noix, sont récoltés depuis des millénaires en Asie centrale et en Méditerranée. C’est grâce aux échanges culturels et commerciaux qui ont marqué les Temps modernes que ces plantes ont été diffusées dans le monde entier.
Les légumineuses (haricots, pois, cacahuètes…) et les fruits à coque (noix, noisettes, amandes…) sont essentiels à un régime sain. Riches en glucides complexes, en protéines, en micronutriments, en vitamines B et en fibres, les légumineuses aident à prévenir les maladies cardiaques, le diabète et l'obésité. La digestibilité de leurs protéines par l’humain est cependant relative, selon la variété et le mode de préparation. Leur culture peut quant à elle améliorer la fertilité des sols grâce à la fixation de l’azote, réduisant l’utilisation d’engrais chimiques. À quantité équivalente de protéines, la production des légumineuses nécessite beaucoup moins d’eau et d’énergie que la viande, émet moins de gaz à effet de serre et contribue ainsi à la durabilité environnementale. La consommation des légumineuses est donc bénéfique à la fois pour la santé et pour la planète.
Melchior d’Hondecoeter, Sol de forêt avec des oiseaux, des papillons et un lézard, ca 1668, Rijksmuseum, Amsterdam, SK-A-169 © Rijkstudio
Lait, yoghourt, fromages !
Des témoignages archéologiques trouvés au Moyen-Orient et en Europe indiquent que l’humanité consomme du lait et produit du fromage depuis respectivement environ 11 000 et 7 000 ans. C'est la domestication des vaches, des moutons, des chèvres et, plus tardivement, des chamelles qui a permis le développement de la production laitière. Si les premières traces de fromage ont été retrouvées dans la région du Croissant fertile au Moyen-Orient, cette pratique s’est ensuite étendue à l’Europe, à l’Asie centrale et à l’Afrique du Nord. Le lait de chamelle est particulièrement important dans les régions arides, comme le Moyen-Orient et certaines parties de l’Afrique. Le lait et ses dérivés jouent un rôle essentiel dans de nombreuses cultures alimentaires à travers le monde.
Les produits laitiers, comme le lait, le beurre et les fromages, sont riches en calcium, en protéines de haute qualité, en vitamine B12 et en vitamine D, qui sont essentielles pour la santé des os, des muscles et du système nerveux. Cependant, à l’échelle mondiale, leur production engendre des défis environnementaux significatifs tels que les émissions de gaz à effet de serre, la déforestation pour l’expansion des pâturages, la production de fourrage ou encore l’utilisation intensive d’eau. De plus, l’élevage laitier intensif pose le problème de la gestion des déjections animales, sources majeures de pollution de l’air, des sols et des eaux.
Floris Claesz van Dijck, Nature morte avec fromages, ca 1615, Rijksmuseum, Amsterdam, SK-A-4821 © Rijkstudio
Des légumes de toutes les couleurs !
Il y a environ 10 000 ans, l’humanité a commencé à cultiver une grande variété de légumes dans plusieurs foyers de culture à travers le monde. Par exemple, des carottes étaient produites en Mésopotamie, tandis que l’on trouvait des betteraves en Europe ou encore des choux et des épinards en Asie. Le nombre d’espèces de légumes cultivées à l’échelle de la planète ne représente pourtant qu’une petite fraction des quelque 300 000 plantes connues, dont 30 000 sont potentiellement comestibles. Une trentaine seulement constitue aujourd’hui la base de l’alimentation planétaire, tout en en offrant des milliers de variétés ! Le maraîchage révèle une histoire multimillénaire de sélection génétique et de circulation des espèces d’une région à l’autre.
La consommation régulière d’une variété de légumes, dont les légumes racines, les légumes verts, orange et rouges, apporte de nombreux bienfaits pour la santé, notamment grâce à leur richesse en vitamines, minéraux, fibres et antioxydants. Les risques sanitaires associés à la consommation de légumes sont exceptionnellement rares et insignifiants comparés à ceux des autres aliments. Si leur culture, marquée par une grande biodiversité, a été durable pendant des millénaires, leur production intensive et extensive peut aujourd’hui avoir un impact négatif sur les écosystèmes et la biodiversité, notamment par l’utilisation excessive de pesticides et d’engrais ou encore par l’artificialisation des sols. Il est essentiel de promouvoir des pratiques agricoles durables afin de minimiser cet impact tout en encourageant une alimentation riche en légumes pour soutenir la santé humaine et environnementale à long terme.
Adriaen Coorte, Nature morte avec asperges, 1697, Rijksmuseum, Amsterdam, SK-A-2099 © Rijkstudio
Taros, patates et topinambours…
La culture des tubercules, comme les pommes de terre, les topinambours, le taro et le manioc, a commencé il y a plusieurs millénaires dans divers foyers agricoles à travers le monde. Les pommes de terre sont originaires des Andes, où elles sont cultivées depuis plus de 9 000 ans. Le taro est traditionnellement cultivé en Asie du Sud-Est et dans le Pacifique. Les topinambours ont été domestiqués en Amérique du Nord tandis que le manioc, originaire d’Amérique du Sud, est devenu un aliment de base en Afrique subsaharienne. Ces tubercules constituent une source importante de calories et de nutriments essentiels dans de nombreuses régions du monde. Ils ont constitué la base alimentaire de nombreuses sociétés dans des climats variés et parfois difficiles.
Les pommes de terre, les topinambours, le taro et le manioc jouent un rôle crucial dans la nutrition mondiale en tant que sources riches en glucides et en vitamines essentielles. Les pommes de terre, qui présentent une certaine résilience, sont cultivées sous divers climats et dans différents sols. Les topinambours, adaptés aux climats tempérés, et le taro, en Asie du Sud-Est et dans le Pacifique, sont également des aliments de base de l’alimentation locale. En Afrique subsaharienne, le manioc est une source vitale de calories dans les régions arides, bien que son rendement soit généralement très faible. Quand il ne s’agit pas de monoculture intensive, la culture de ces tubercules présente des avantages agronomiques, tels que la conservation des sols et une résistance aux maladies, qui contribuent à la sécurité alimentaire locale.
Suze Robertson, Paysanne pelant des pommes de terre, 1875 – 1922, Rijksmuseum, Amsterdam, SK-A-4696 © Rijkstudio
Une abondance de fruits
Les humains ont commencé à domestiquer des arbres fruitiers et à cultiver des fruits pour leur consommation il y a environ 10 000 ans, au cours de la « révolution néolithique ». Parmi les premiers fruits cultivés et utilisés dans l’alimentation à cette époque, on trouve notamment les figues au Moyen-Orient, les dattes en Afrique du Nord, les olives dans le bassin méditerranéen et les raisins en Eurasie. Cette pratique s’est rapidement étendue à d’autres continents, où des fruits indigènes comme les mangues en Asie du Sud-Est, les bananes en Papouasie Nouvelle-Guinée, ainsi que les ananas en Amérique du Sud ont été domestiqués et intégrés aux régimes alimentaires locaux. La culture et la transformation des fruits ont ainsi connu une diversification continue, remplissant des rôles tant nutritionnels que culinaires pour les populations à travers le monde.
La consommation régulière de fruits frais est essentielle pour la santé car ils apportent des vitamines, des minéraux, des fibres et des antioxydants. Elle contribue à renforcer le système immunitaire, à prévenir les maladies cardiovasculaires et à maintenir un poids optimal. Les techniques de production de fruits traditionnelles respectent les écosystèmes en diversifiant les cultures, en en assurant la rotation et en utilisant des méthodes biologiques de lutte contre les pathogènes et les ravageurs. Elles favorisent la biodiversité, protègent les sols et réduisent l’usage des produits chimiques. À l’inverse, la production intensive de fruits à très grande échelle est synonyme de déforestation, de pollution des sols et de l’eau par les pesticides et d’une utilisation d’eau extrêmement élevée qui menacent la durabilité environnementale et alimentaire, souvent à court terme.
Martinus Nellius, Nature morte avec des coings, des nèfles et un verre, 1669 – 1719, Rijksmuseum, Amsterdam, SK-A-1751 © Rijkstudio
Les céréales
Produits emblématiques de la « révolution néolithique », les cinq principales céréales consommées dans le monde, le maïs, le blé, le riz, l’orge et le sorgho, ont été domestiquées à des périodes différentes, entre 3 000 et 10 000 ans avant notre ère et dans plusieurs régions de la planète. Ainsi, le blé a été domestiqué au Moyen-Orient, le riz en Asie, le maïs en Amérique centrale, l’orge au Proche Orient et le sorgho en Afrique. Ensemble, ces céréales constituent une part substantielle de l’apport calorique mondial : le blé, le maïs et le riz, par exemple, en représentent plus de 40 %, tandis que l’orge et le sorgho sont des composants essentiels de nombreux régimes alimentaires à plus petite échelle.
La consommation de céréales est bénéfique pour la santé en raison de leur richesse en glucides complexes, en fibres, en vitamines B et en minéraux. Elles fournissent une énergie durable, favorisent la digestion et aident à prévenir les maladies cardiovasculaires ainsi que le diabète de type 2. Cependant, les céréales raffinées utilisées pour le pain blanc, les viennoiseries, les pâtes alimentaires ou encore les tortillas de maïs et les nachos, manquent de fibres et de nutriments, favorisant les problèmes de poids, les pics de glycémie et les maladies métaboliques. De ces céréales on a retiré le germe et le son des graines pour des raisons de conservation et de facilité d’utilisation. Pour une alimentation équilibrée, qui maximise les bienfaits nutritionnels tout en minimisant les risques pour la santé, il est crucial de privilégier la diversité ainsi que les céréales complètes, en consommant par exemple du quinoa, de l’avoine, du sarrasin, de l’épeautre, du seigle…
Pierre François Legrand d’après Gerard van Spaendonck, Maïs, 1799 – 1801, Rijksmuseum, Amsterdam, RP-P-1909-4231 © Rijkstudio
Beurre, huiles et graisses
La fabrication d’huile d’olive remonte à environ 8 000 ans, dans le Croissant fertile au Moyen-Orient. Elle se diffuse ensuite en Méditerranée, où elle était utilisée il y a 6 000 ans déjà par les civilisations antiques pour ses propriétés culinaires et diététiques. Des huiles alimentaires sont extraites de quantité de graines, de fruits à coque et de légumineuses. L’huile de graines de tournesol était produite en Amérique du Nord il y a 5 000 ans. Elle n’est produite en Europe et en Russie qu’à partir du XIXe siècle. Quant à l’huile de palme, originaire d’Afrique de l’Ouest, elle s’est répandue dans le monde au XXe siècle pour son rendement élevé, mais elle est controversée en raison des effets dévastateurs de sa culture sur les forêts tropicales. L’huile de poisson, riche en acides gras n-3, est essentielle dans les régimes alimentaires côtiers depuis des siècles. Le beurre, le saindoux et le suif, qui sont des produits d’origine animale, ont été des sources importantes de matières grasses dans les régions où le bétail était élevé. Collectivement, ces graisses et huiles sont des composants clés de la diète mondiale, fournissant des calories et des nutriments essentiels à la santé humaine.
Bien que toutes les huiles aient un contenu calorique équivalent, leur impact sur la santé varie considérablement, surtout lorsqu’elles sont chauffées à haute température. L’huile d’olive, riche en acides gras mono-insaturés, est bénéfique pour le cœur, même cuisinée à haute température. L’huile de tournesol, source d’acides gras polyinsaturés, peut réduire le cholestérol, mais elle génère des composés nocifs à haute température. L’huile de palme, riche en acides gras saturés, augmente les risques cardiovasculaires, d’autant plus lorsqu'elle est chauffée. L’huile de poisson, riche en acides gras n-3, est bonne pour le cœur et le cerveau, mais sa teneur en acides gras instables nécessite une cuisson douce. Le beurre, le saindoux et le suif, riches en acides gras saturés, produisent des composés toxiques lorsqu’ils sont chauffés et doivent être consommés avec modération. Le choix des huiles et graisses est donc crucial, non seulement en fonction de leur composition en acides gras, mais aussi de leur stabilité à haute température, afin de minimiser leurs effets potentiellement néfastes sur la santé.
Anonymous, Padang Halaban. Département des récoltes. En novembre 1928, 1928, Rijksmuseum, Amsterdam, NG-1992-4-1-41-3 © Rijkstudio
Les sucres ajoutés
L’humanité produit et consomme du sucre en très petite quantité depuis l’Antiquité, avec les premières formes issues de la canne à sucre, originaire de Papouasie Nouvelle-Guinée et cultivée en Inde depuis plus de 2 500 ans. Le sucre de canne a été diffusé au Moyen-Orient grâce aux Perses, puis dans le bassin méditerranéen lors de la conquête arabo-musulmane au VIIe siècle, avant d’atteindre le reste de l’Europe médiévale grâce aux croisades. Au XVIe siècle, la création de plantations esclavagistes de canne à sucre dans les colonies américaines a engendré une explosion de la production et de la diffusion du sucre de canne. Au XIXe siècle, l’essor de la production de betteraves sucrières en Europe a diversifié les sources de sucre, alors toujours davantage raffiné, ce qui le rendait encore plus attrayant et plus accessible à l’échelle mondiale.
La consommation excessive de sucres et de leurs nombreux dérivés industriels présents dans les aliments transformés et les boissons sucrées a un impact significatif sur la santé mondiale. Ils contribuent non seulement aux épidémies d’obésité, de diabète de type 2 et de maladies cardiovasculaires, mais aussi aux caries dentaires. Selon l’Organisation mondiale de la Santé, environ 43 % des adultes dans le monde sont en surpoids ou obèses et 10 % sont déjà affectés par le diabète, principalement à cause d’une alimentation trop riche en sucres. Cette surconsommation entraîne dès lors des coûts de santé publique élevés et réduit considérablement l’espérance de vie en bonne santé. Par ailleurs, les cultures sucrières constituent des monocultures intensives, très gourmande en eau en ce qui concerne la canne à sucre, qui ont un fort impact sur l’environnement et entrent en concurrence avec les productions alimentaires plus favorables à une alimentation saine.